Les cinéphiles (et sans doute aussi les autres) se rappelleront pendant longtemps de la dernière cérémonie des César, la cérémonie de récompenses ultimes du cinéma français. Elle se tient chaque année pour célébrer le meilleur du cinéma français. Mais en 2020, quelques semaines avant qu'elle n'ait lieu, de grosses polémiques ont enflammé la toile et les médias. En cause, la nomination à douze reprises de Roman Polanski, le réalisateur reconnu coupable de viol dans les années 70 aux États-Unis, et accusé par des dizaines de femmes d'agression sexuelle. Son film J'accuse s'imposait pourtant comme le grand favoris des César, alors qu'Adèle Haenel, une comédienne française qui s'était confiée sur le viol qu'elle a subi plus jeune alors qu'elle débutait sa carrière, était elle aussi en compétition pour Portrait de la jeune fille en feu.
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Polanski victorieux, Haenel indignée
Malgré les polémiques, la cérémonie s'est tenue et le pire (pour beaucoup) est arrivé avec le sacre de Roman Polanski comme meilleur réalisateur. Absent, le metteur en scène n'est pas venu récupérer sa statuette. Mais sitôt son nom prononcé, Adèle Haenel a quitté la salle, en disant qu'il s'agissait d'une honte, avant de chanter ironiquement « Vive la pédophilie » (la victime de Polanski aux États-Unis était mineure au moment des faits).
Cette action forte de sens, sans doute viscérale, a été énormément commentée – parfois même plus que la récompense de Polanski. Et Maïwenn n'a pas manqué d'égratigner l'actrice pour cela lors d'un entretien accordé à Paris Match : “Polanski a reçu un prix pour un film formidable, où est le problème ? On ne lui a pas non plus décerné un prix Nobel ! Adèle Haenel doit avoir un gros bobo quelque part, pour être partie comme elle l'a fait.”
Si par « gros bobo » Maïwenn entend le viol, alors oui, l'actrice a un « gros bobo ». Cette prise de parole choquante n'est pas passée inaperçue sur les réseaux sociaux où la réalisatrice de Polisse et Mon Roi s'est faite énormément critiquer. Car elle s'en est aussi prise aux féministes, elle qui a donné son point de vue sur le sifflement dans la rue, qu'elle encourage.
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Maïwenn aime être sifflée dans la rue
« J'espère que les hommes me siffleront dans la rue toute ma vie. Je ne me suis jamais sentie offensée parce qu'un homme portait un regard bestial sur moi. Au contraire, je prends ça comme un compliment.” Avec ses mots, Maïween met en avant une thèse défendue par quelques personnes (qui sont minoritaires) et vient relancer le débat. Cela va à l'encontre des mesures prises par le gouvernement d'Emmanuel Macron qui condamne avec une certaine fermeté désormais le harcèlement de rue.
La vision qu'a Maïween des femmes féministes n'est pas des plus flatteuses : “C'est fou ce qu'elles peuvent dire comme conneries, ces derniers temps ! Ce sont des femmes qui n'aiment pas les hommes, c'est clair, et qui sont à l'origine de dommages collatéraux très graves.”
Mais là où sa parole pose encore plus problème, c'est lorsqu'elle met la faute sur les femmes victimes de viol, en disant qu'elles peuvent bien se douter qu'avoir un rendez-vous dans une chambre d'hôtel dans la nuit n'a rien de professionnel. “Si j'accepte de me rendre dans la chambre d'un homme à 1h du matin, je me doute bien que ce n'est pas pour parler d'un rôle ! » dit-elle.
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Une énorme polémique sur les réseaux sociaux
Elle devait s'en douter, mais ses propos ne sont pas immédiatement tombés dans l'oubli et ont au contraire fait énormément réagir sur les réseaux sociaux. « Maïwenn en roue libre total. Son interview entière est à gerber.. » ; « Absolument RIEN ne va dans cette interview » ; « Dans une interview ultra-nauséabonde, Maïwenn : – affirme que les féministes disent des conneries – encourage le harcèlement de rue – se moque d'Adèle Haenel – laisse entendre que certaines victimes de viol l'ont bien cherché » peut-on lire sur Twitter.
On ignore si la réalisatrice se défendra puisque ses propos étaient clairs. Cela nous étonnerait si elle revenait en arrière. Mais ce mode de pensée semble tout droit sorti d'un ancien temps, un temps que beaucoup souhaite oublier pour se tourner vers un avenir où les femmes n'auront plus à se méfier dans le milieu du cinéma (et dans la vie en règle générale). Si elle voulait faire parler d'elle à l'occasion de la sortie de son film ADN, mission accomplie.